Parkinson : l’Etat compte-il enfin soutenir les aidants ?

Alors que la réforme sur la fin de vie alimente les discussions en France, une problématique majeure reste sous-estimée : l’accompagnement des patients atteints de la maladie de Parkinson en phase terminale. Un dossier de presse publié le 25 février 2025 par France Parkinson, en collaboration avec l’institut Viavoice, met en lumière les insuffisances des dispositifs actuels et formule des recommandations urgentes pour adapter la prise en charge à cette pathologie neurodégénérative spécifique.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 3 mars 2025 11h32
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Parkinson : l’Etat compte-il enfin soutenir les aidants ? © Shutterstock

Les patients atteints de la maladie de Parkinson en phase avancée subissent une dégradation sévère de leur état de santé, nécessitant une approche spécifique et coordonnée des soins palliatifs. Pourtant, l’enquête menée par France Parkinson révèle un déficit criant de prise en charge, avec des ruptures de suivi médical et un manque de formation des soignants. À travers cette étude, l’association alerte sur une réalité trop souvent ignorée : l’abandon progressif de ces patients par le système de santé.

Un état des lieux préoccupant : des soins inadaptés aux besoins des patients

La maladie de Parkinson, deuxième pathologie neurodégénérative la plus fréquente après Alzheimer, concerne environ 270 000 personnes en France. À mesure que la maladie progresse vers un stade avancé, les symptômes deviennent plus complexes à gérer : troubles moteurs sévères, rigidité extrême, dyskinésies incontrôlées, douleurs chroniques, et altérations des fonctions autonomes, notamment la déglutition et la respiration. Pourtant, l’enquête de France Parkinson révèle que la prise en charge de fin de vie de ces patients est largement insuffisante et inadaptée à leurs besoins spécifiques.

Un des constats majeurs concerne le manque de coordination des soins. 46 % des professionnels de santé et des aidants interrogés estiment que la coordination entre les acteurs du parcours de soin est insatisfaisante. Ce défaut d’organisation se traduit notamment par des ruptures de traitement, des décisions médicales inappropriées et une absence de suivi des directives anticipées. À cela s’ajoute un manque de sensibilisation des structures de soins palliatifs à la gestion spécifique des traitements dopaminergiques, pourtant cruciaux pour le confort du patient.

Les lacunes observées dans les EHPAD et les établissements hospitaliers sont particulièrement préoccupantes. 39 % des professionnels travaillant en EHPAD estiment que la maladie de Parkinson n’est pas suffisamment prise en compte dans la prise en charge des patients en fin de vie. Cette méconnaissance a des conséquences directes sur l’état des malades, notamment à travers une rupture du suivi neurologique, un arrêt non justifié des traitements et une absence de gestion efficace de la douleur.

Un suivi neurologique défaillant : un facteur aggravant de la souffrance des patients

La spécificité de la maladie de Parkinson repose sur la nécessité d’un suivi médical rigoureux, même en phase terminale. Pourtant, 37 % des professionnels de santé déclarent que le suivi avec le neurologue est interrompu chez ces patients en fin de vie. 45 % estiment que ce suivi est moins soutenu qu’auparavant, ce qui signifie que plus de 80 % des malades en fin de vie sont privés d’un accompagnement neurologique adapté.

Cette situation est particulièrement critique dans les établissements hospitaliers et les EHPAD, où 26 % des interruptions de suivi sont imposées par les structures elles-mêmes. En d’autres termes, au moment où les patients nécessitent une expertise neurologique renforcée, leur prise en charge est reléguée à des médecins généralistes, souvent insuffisamment formés aux spécificités des fluctuations motrices et non motrices de la maladie de Parkinson.

Le manque de suivi entraîne également une altération du traitement médicamenteux, élément fondamental de la gestion des symptômes en fin de vie. 66 % des professionnels de santé déclarent que le traitement antiparkinsonien est soit interrompu, soit mal administré. Cette situation, dénoncée par France Parkinson, entraîne des complications majeures, notamment des syndromes de sevrage dopaminergique pouvant provoquer une rigidité extrême, des douleurs accrues, des hallucinations ou encore une aggravation des troubles moteurs.

Une gestion inadaptée des traitements et une méconnaissance de la maladie dans les établissements de soins

L’enquête met en évidence un problème central : l’absence de formation des professionnels de santé aux spécificités de la maladie de Parkinson. En EHPAD, 45 % des soignants déclarent ne pas avoir reçu de formation sur cette pathologie. En soins palliatifs, ce chiffre atteint 46 %, ce qui souligne une lacune critique dans l’accompagnement des patients en phase avancée.

Ce manque de connaissances se traduit notamment par des erreurs dans l’administration des traitements. 86 % des professionnels de santé interrogés déclarent que l’interruption du traitement dopaminergique est liée à l’impossibilité du patient d’avaler ses médicaments. Pourtant, des alternatives existent, notamment l’apomorphine sous forme de stylo injectable ou de pompe, ou encore le patch de rotigotine. Malgré ces solutions, 54 % des soignants reconnaissent qu’aucune alternative n’a été mise en place lorsque le traitement oral a été stoppé.

Le problème est encore plus flagrant en hôpital et en EHPAD, où les horaires des traitements ne sont pas respectés. En raison de la rigidité organisationnelle des établissements, les patients ne reçoivent pas leurs médicaments au moment optimal, ce qui aggrave leurs symptômes moteurs et non moteurs. Les aidants dénoncent un manque total de prise en compte de la temporalité stricte des traitements antiparkinsoniens, ce qui aboutit à des situations où les patients se retrouvent totalement immobilisés ou souffrant de douleurs extrêmes.

Des solutions existent mais restent ignorées des pouvoirs publics

Face à ce constat alarmant, France Parkinson et les experts interrogés formulent plusieurs recommandations visant à améliorer la prise en charge de la fin de vie des patients atteints de cette pathologie. En premier lieu, il est impératif de renforcer la formation des professionnels de santé, en intégrant des modules spécifiques sur la gestion des symptômes en phase avancée et sur l’importance du maintien des traitements dopaminergiques.

L’association propose également de désigner un référent Parkinson au sein des structures de soins, un professionnel infirmier ou un neurologue pouvant coordonner la prise en charge et assurer un suivi personnalisé des patients. Cette mesure permettrait d’éviter les interruptions de traitement injustifiées et de garantir une meilleure adaptation des soins palliatifs aux spécificités de la maladie.

France Parkinson milite aussi pour une prise en compte des particularités de la maladie de Parkinson dans le cadre de la réforme de la fin de vie. L’association réclame une adaptation des protocoles de soins palliatifs, la reconnaissance des alternatives médicamenteuses en cas d’impossibilité d’administration orale et une sensibilisation accrue des établissements de santé à la nécessité d’une prise en charge spécialisée.

Vers une meilleure prise en charge des malades en fin de vie ?

À l’heure où la France débat des modalités d’accompagnement des patients en phase terminale, les personnes atteintes de la maladie de Parkinson demeurent largement ignorées des discussions politiques et législatives. Pourtant, leur situation illustre parfaitement les défaillances du système de santé en matière de soins palliatifs et d’accompagnement des maladies neurodégénératives.

Si aucune mesure concrète n’est prise, des milliers de patients continueront à souffrir, abandonnés par un système de santé incapable de répondre aux défis posés par cette pathologie.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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