Les résultats d’une récente étude menée en France révèlent des changements notables dans les comportements d’achat de produits d’hygiène. Derrière ces ajustements, l’impact d’une loi encadrant strictement les promotions.
Achats d’hygiène : l’impact concret de la loi Descrozaille sur le quotidien des Français

Le 14 avril 2025, une enquête réalisée par OpinionWay pour ShopFully a révélé que 74 % des Français ont observé une hausse des prix sur les produits de droguerie, parfumerie et hygiène depuis l’entrée en vigueur, en mars 2024, de la loi Descrozaille. Cette législation vise à encadrer les réductions commerciales dans le secteur non alimentaire. En lien direct avec cette évolution, près de 60 % des consommateurs déclarent avoir changé leurs habitudes d’achat. Ces comportements soulèvent des interrogations quant à l’accessibilité financière de produits essentiels à l’hygiène quotidienne, avec des implications possibles sur la santé publique.
Un encadrement réglementaire aux conséquences rapides
La loi Descrozaille, adoptée dans un objectif de régulation économique, plafonne les promotions sur les produits de droguerie, parfumerie et hygiène à 34 % de réduction sur le prix unitaire et 25 % sur les volumes. Ce dispositif s’inscrit dans un effort de stabilisation du marché, en particulier pour limiter les effets de la guerre des prix entre enseignes, qui pèse sur les marges des fabricants.
Cette régulation a entraîné des effets perceptibles dès les premières semaines. L’étude citée montre que les consommateurs ont rapidement ressenti une élévation des prix dans les rayons. Ce ressenti est particulièrement marqué chez les ménages avec enfants ou à faibles revenus, qui déclarent avoir dû adapter leur manière d’acheter des produits pourtant considérés comme basiques dans l’hygiène quotidienne.
Des modifications d’habitudes d’achat révélatrices
La suppression d’offres promotionnelles largement utilisées auparavant a contraint une part importante de la population à revoir sa stratégie d’achat. Parmi les nouvelles habitudes recensées, certaines sont révélatrices d’un réajustement économique : choix d’enseignes offrant encore des réductions, substitution des marques habituelles par des références à moindre coût, réduction de la fréquence d’achat.
Si ces ajustements relèvent d’une logique budgétaire, ils posent aussi la question de l’accès régulier à des produits essentiels à l’hygiène corporelle et domestique. Dans certains foyers, cela pourrait conduire à une baisse de la fréquence d’usage de ces produits, ce qui soulève des inquiétudes en matière de prévention et de santé publique.
Le critère prix en première ligne dans les arbitrages
Dans le processus de sélection d’un produit d’hygiène, le prix s’impose désormais comme le facteur déterminant. L’étude montre que 79 % des personnes interrogées déclarent que le prix est le critère numéro un de leur décision d’achat. Ce taux est nettement supérieur à celui d’autres critères pourtant associés à la sécurité ou à la confiance, tels que la composition (56 %) ou la marque (58 %).
Cette hiérarchisation souligne un arbitrage économique accentué par la disparition d’un levier d’accessibilité : la promotion. Elle met aussi en évidence la fragilité de certains foyers face à la hausse des prix, et la nécessité de préserver une offre accessible sur les produits essentiels à l’hygiène, sans compromettre leur qualité.
Des budgets contraints, inégalement répartis
L’étude souligne que 68 % des consommateurs consacrent moins de 30 euros par mois aux produits d’hygiène. Cette limitation budgétaire est encore plus marquée chez les personnes inactives, pour lesquelles ce taux atteint 75 %. À l’opposé, certaines catégories, notamment les Franciliens et les CSP+, disposent de budgets plus élevés.
Ces écarts témoignent d’inégalités d’accès, accentuées par la fin des remises substantielles, qui jouaient un rôle de régulation indirecte. Le risque est que certains publics, confrontés à une pression budgétaire plus forte, réduisent leurs achats dans des catégories pourtant essentielles au maintien d’un bon niveau d’hygiène et à la prévention de diverses pathologies.
Des ajustements commerciaux face à la législation
Dans ce nouveau cadre réglementaire, les distributeurs ont réagi en adaptant leurs pratiques. Certains ont recours à des solutions comme le cagnottage, les réductions différées ou les offres groupées, permettant de compenser en partie la perte de pouvoir d’achat perçue par les consommateurs. Bien que ces dispositifs soient légaux, ils complexifient l’accès aux réductions pour les publics moins familiarisés avec les programmes de fidélité ou les outils numériques associés.
Cette évolution peut également contribuer à creuser les inégalités entre consommateurs avertis, capables d’optimiser leurs achats via ces nouvelles formes de promotion, et ceux qui, par manque d’information ou de ressources, en sont exclus.
Une réflexion à mener sur la santé publique et l’hygiène de base
Au-delà des considérations économiques, les effets de la loi Descrozaille méritent d’être observés à travers le prisme de la santé publique. Les produits d’hygiène, savon, dentifrice, produits menstruels, nettoyants ménagers, sont des éléments clés de la prévention des maladies infectieuses, de la santé bucco-dentaire ou encore de l’hygiène menstruelle.
Si l’accès à ces produits devient restreint pour une partie de la population, cela pourrait à terme engendrer des impacts négatifs sur la santé individuelle et collective. La mise en place de dispositifs d’accompagnement ou de surveillance pourrait être envisagée pour anticiper d’éventuelles ruptures dans les usages.