Le CBD s’est imposé sur le marché français comme un produit de bien-être, en vente libre et consommé sous forme d’huiles, de gélules ou encore d’infusions. Souvent perçu comme inoffensif en raison de son origine naturelle, il fait pourtant l’objet d’une mise en garde par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
CBD : si vous êtes sous traitement, arrêtez de suite d’en consommer !

Le 11 mars 2025, l’ANSM a publié un communiqué soulignant les dangers liés à la consommation de CBD en parallèle de traitements médicamenteux. L’agence met en avant les interactions possibles avec de nombreuses classes de médicaments, lesquelles pourraient avoir des conséquences sévères sur la santé des patients concernés. En interférant avec le métabolisme hépatique, le CBD peut perturber l’efficacité des traitements, augmentant le risque d’effets secondaires ou, à l’inverse, réduisant leur action thérapeutique.
Un impact direct sur l’action des médicaments
Le CBD agit en inhibant certaines enzymes du foie, notamment celles du cytochrome P450, un groupe enzymatique impliqué dans la métabolisation de nombreux médicaments. En interférant avec ces processus, il modifie la vitesse à laquelle certains principes actifs sont éliminés de l’organisme. Lorsque cette dégradation est ralentie, la concentration du médicament dans le sang peut augmenter, entraînant un risque accru d’effets secondaires. À l’inverse, si le CBD accélère la dégradation d’un traitement, celui-ci pourrait devenir inefficace, compromettant ainsi la prise en charge médicale du patient.
L’ampleur de ces interactions varie selon plusieurs facteurs, notamment la dose de CBD consommée, la régularité de son usage et les caractéristiques physiologiques propres à chaque individu. Certains traitements sont particulièrement vulnérables à ces interférences, nécessitant une vigilance renforcée de la part des patients et des professionnels de santé.
Quels sont les médicaments les plus exposés aux interactions avec le CBD ?
Les recherches et les signalements de pharmacovigilance ont permis d’identifier plusieurs classes de médicaments susceptibles d’être affectées par la consommation de CBD. Les anticoagulants, couramment prescrits pour prévenir la formation de caillots sanguins, figurent parmi les traitements les plus concernés. En ralentissant leur élimination, le CBD pourrait entraîner une augmentation du risque hémorragique, nécessitant un ajustement précis du dosage.
Les antiépileptiques font également partie des médicaments impactés. L’interaction avec le CBD peut soit accentuer leurs effets sédatifs, exposant les patients à une somnolence excessive, soit en réduire l’efficacité, augmentant ainsi le risque de crises. Les antidépresseurs et les antipsychotiques ne sont pas en reste, avec une possible intensification des effets secondaires, tels que la somnolence, l’agitation ou encore des troubles cognitifs.
Les benzodiazépines et les hypnotiques, largement utilisés dans le traitement des troubles anxieux et des insomnies, peuvent voir leur effet prolongé en raison de l’interférence du CBD avec leur métabolisme. Cela peut accentuer la sédation et favoriser des épisodes de somnolence diurne, rendant des activités telles que la conduite particulièrement dangereuses.
D’autres médicaments, comme certains antibiotiques, antifongiques et traitements cardiovasculaires, sont également concernés par ces interactions. Par ailleurs, des modifications de la glycémie ont été observées chez des patients diabétiques consommant du CBD en parallèle de leur traitement, soulignant la nécessité d’une surveillance accrue.
Des effets indésirables parfois sévères
Les interactions médicamenteuses entre le CBD et certains traitements ne sont pas purement théoriques, mais ont déjà été documentées dans les bases de données de pharmacovigilance. En France, entre 2017 et 2023, 58 cas ont été signalés aux centres antipoison, dont quatre cas graves ayant nécessité une hospitalisation.
Parmi les effets secondaires les plus fréquemment rapportés figurent une somnolence excessive, susceptible de compromettre la vigilance et d’accroître le risque d’accidents domestiques ou professionnels. Des épisodes d’hypotension, provoquant des vertiges et des malaises, ont également été observés, notamment chez les patients suivant un traitement pour des troubles cardiovasculaires.
Chez certains patients diabétiques, des fluctuations de la glycémie ont été enregistrées, pouvant conduire à des épisodes d’hypoglycémie sévère. Par ailleurs, des anomalies des tests hépatiques ont été relevées chez des patients prenant du CBD en parallèle de médicaments hépatotoxiques, suggérant une toxicité potentielle pour le foie.
Face à ces observations, l’ANSM insiste sur la nécessité d’un suivi médical rigoureux pour les patients combinant CBD et médicaments, et appelle les professionnels de santé à signaler tout effet indésirable suspecté via les dispositifs de pharmacovigilance.
Précautions à prendre pour les consommateurs sous traitement
Compte tenu des incertitudes entourant les interactions du CBD avec certains médicaments, l’ANSM recommande aux patients concernés d’adopter une approche prudente. Toute personne sous traitement médical souhaitant consommer du CBD doit en informer son médecin afin d’évaluer les risques et, si nécessaire, ajuster la posologie de son traitement.
Il est conseillé de rester attentif aux éventuels symptômes inhabituels pouvant survenir après la prise de CBD. Une modification de l’efficacité du traitement, des effets secondaires exacerbés ou l’apparition de nouveaux symptômes doivent amener à consulter rapidement un professionnel de santé. Dans certains cas, un arrêt temporaire du CBD peut être recommandé pour observer l’évolution des symptômes.
L’ANSM insiste également sur la nécessité d’améliorer l’information des consommateurs. Actuellement, aucune obligation réglementaire n’impose aux fabricants de produits à base de CBD d’indiquer clairement les risques d’interaction médicamenteuse sur les emballages. Une évolution législative visant à renforcer la transparence et à mieux encadrer la commercialisation de ces produits pourrait s’avérer nécessaire.
Vers une régulation plus stricte du CBD en France ?
Alors que le marché du CBD connaît une expansion rapide, la question de son encadrement réglementaire suscite des débats. Contrairement aux médicaments,,les produits à base de CBD ne font pas l’objet des mêmes contrôles en matière de qualité de sécurité et de traçabilité. Cette situation pose un véritable enjeu de santé publique, notamment en ce qui concerne les risques d’interactions médicamenteuses.
L’ANSM plaide pour une meilleure régulation, incluant un étiquetage obligatoire des risques, une sensibilisation accrue des professionnels de santé et un encadrement plus rigoureux de la vente des produits à base de CBD. Certains pays, comme le Canada ou certains États américains, ont déjà mis en place des dispositifs similaires afin d’informer les consommateurs et de limiter les risques sanitaires.