La « fraude sociale », que personne ne nie exister, reste une goutte d’eau par rapport à la fraude fiscale opérée par les plus riches et les entreprises. Mais il s’agit d’un véritable leitmotiv de la droite et, surtout, de l’extrême-droite : le gouvernement semble vouloir tendre la main à ces derniers en lançant un projet de carte Vitale biométrique.
La carte Vitale biométrique fera l’objet d’une mission parlementaire
François Braun, nouveau ministre de la Santé, a choisi son camp : mardi 20 juillet 2022, il a annoncé devant les dépités que l’idée d’une carte Vitale biométrique pourrait bien faire l’objet d’une « mission parlementaire ». En tout cas, le gouvernement n’y est pas contre, l’idée méritant « d’être travaillée », a déclaré le ministre.
Objectif ? Traquer plus facilement la fraude sociale en France. Une obsession de la droite et de l’extrême-droite qui associe fraude sociale et immigration. « Nous devons nous assurer que les prestations sont versées à bon droit, que les cotisations et contributions sociales sont recouvrées de manière exhaustive », a précisé le ministre de la Santé devant les parlementaires.
François Braun précise toutefois d’où vient l’idée de lancer cette mission parlementaire : c’est Élisabeth Borne, Première ministre, qui l’a demandé. Pour l’exécutif, c’est une manière de se mettre dans la poche la partie droite de l’Assemblée nationale afin d’obtenir la majorité sur certains texte. Une stratégie politique que François Braun présente comme une preuve de « l’écoute des idées constructives pour faire avancer notre pays de façon transpartisane ».
La fraude fiscale est largement supérieure à la fraude sociale
S’il faut évidemment lutter contre la fraude sociale, la mesure a de quoi étonner : alors que la dette publique explose depuis la crise sanitaire, le cibler la fraude sociale n’est pas l’axe le plus efficace. Le gouvernement devrait plutôt chercher à lutter plus efficacement contre la fraude fiscale.
Car cette dernière est largement supérieure : en 2019, la fraude fiscale détectée avait été de 13,7 milliards d’euros, contre une estimation entre 80 et 100 milliards. De son côté, la fraude sociale est estimée à environ 12 milliards d’euros, toutes formes comprises. La fraude fiscale est donc près de 10 fois supérieure à la fraude sociale : la logique voudrait qu'elle soit prioritaire, ne serait-ce que pour des raisons d'efficacité de l'acction des pouvoirs publics.
La décision de lancer un potentiel chantier pour une carte Vitale biométrique, par ailleurs idée refusée par la majorité LREM en 2020, n’a donc aucune logique d’efficacité ou d’amélioration des finances publiques. Elle devra, en outre, répondre aux problématiques de « respect de la vie privée et des données personnelles », raisons qui avaient conduit à l’époque au rejet du projet de loi.
Mais face à la nécessité de s’attirer les faveurs de la droite et l’extrême-droite, il semblerait que ces problématiques soient désormais oubliées.