Face à l’urgence, au printemps 2020 les unités de soins critiques des hôpitaux français ont pu tenir uniquement au prix d’une improvisation organisationnelle et de déprogrammations massives. Mais une telle situation n’est pas viable et va au détriment tant des patients que des personnels, pointe la Cour des comptes dans son rapport annuel.
Unités de soins critiques : une organisation qui mérite d’être repensée
Connaissant déjà une forte activité avant l’arrivée du Covid-19, dès le printemps 2020 les unités de soins critiques (ou unités de réanimation, comme on les appelle communément) ont été mises à rude épreuve. Avec, à la clé, un résultat médiocre : au plus fort de la crise sanitaire, seuls 20 lits de réanimation pour 100.000 habitants étaient disponibles en France, contre 33,9 lits pour 100.000 habitants en Allemagne.
Comme le révèle la Cour des comptes dans son rapport annuel, cette situation aurait pu être évitée si ces unités de soins critiques avaient été organisées différemment. Premier constat : dans le modèle français, une partie des lits de soins critiques (à savoir 6.000 lits) n’est pas placée sous la responsabilité de médecins réanimateurs, mais majoritairement de cardiologues ou de neurologues. Si ce choix de spécialiser les soins intensifs s’avère intéressant en temps normal, il s’est révélé pénalisant pendant la première vague de Covid-19 car ces lits n’ont pas pu être mobilisés pour la prise en charge des patients Covid.
Le rythme d’ouverture de lits de réanimation ne suit pas le vieillissement de la population
Autre faille organisationnelle : malgré le vieillissement de la population, de nouveaux lits de réanimation ne sont pas ouverts au même rythme. D’après les calculs de la Cour des comptes, si la France avait conservé son ratio « nombre de lits/population de plus de 65 ans » de 2013, elle aurait disposé, au début de la crise Covid, de 5.949 lits de réanimation adultes, contre 5.080 constatés au 1er janvier 2020. Dans les 20 années à venir, le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans va progresser de près de 5,2 millions. Il est donc essentiel de procéder à des ouvertures de lits et ce, de toute urgence.
Enfin, la Cour des comptes salue le mode de financement particulier auquel répondent les unités de soins critiques, à savoir une rémunération forfaitaire et pas uniquement à l’activité, un choix de bon sens censé tenir compte des coûts fixes importants inhérents à ces unités. Mais cette moindre dépendance à la tarification à l’activité mériterait d’être développée encore car malgré tout, les unités de soins critiques restent trop dépendantes de la tarification à l’activité, ce qui les pousse à maximiser le taux d’occupation (80 à 85% en temps normal), remettant en question la disponibilité de lits en cas de crise majeure.