Précarité alimentaire : les français en mauvaise santé à cause de l’inflation

L’inflation impacte directement les choix de consommation et l’état de santé des Français. Moins de viande, une réduction de la consommation de fruits et légumes frais, un recours croissant aux promotions et aux produits transformés : l’inflation modifie profondément les habitudes alimentaires et soulève des enjeux de santé publique majeurs. L’étude réalisée en mars 2025 par Ymanci met en lumière l’ampleur de ces changements et les défis qu’ils posent en matière de nutrition et de bien-être.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 7 mars 2025 15h33
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Précarité alimentaire : les français en mauvaise santé à cause de l’inflation © Shutterstock

Depuis plusieurs années, l'inflation et l'augmentation des prix des denrées alimentaires s’accompagnent de transformations notables dans les comportements des consommateurs. Si l’adaptation des ménages à la conjoncture économique est évidente, la question centrale reste celle de l’impact de ces changements sur la santé publique. En 2025, l’étude menée par Ymanci auprès de 2 000 Français met en lumière une évolution préoccupante : la modification des comportements alimentaires s’oriente vers des arbitrages souvent défavorables à une alimentation équilibrée. Entre réduction de la consommation de produits frais, augmentation des achats de produits ultra-transformés et adaptation forcée des portions, les conséquences sanitaires à long terme suscitent des interrogations.

Des choix alimentaires conditionnés par l’inflation

L’une des principales tendances observées concerne la modification des sources de protéines dans l’alimentation quotidienne. La viande et le poisson, traditionnellement associés à des apports en protéines de qualité, voient leur consommation diminuer dans de nombreux foyers en raison de leur coût élevé. Cette évolution entraîne un report partiel vers des alternatives végétales, comme les légumineuses, les œufs ou certains substituts industriels, mais aussi vers une consommation accrue de produits transformés, souvent moins chers mais également plus riches en additifs, en sel et en sucres cachés.

En parallèle, la consommation de fruits et légumes frais, indispensables pour l’apport en fibres, en vitamines et en antioxydants, est également affectée. Une partie des consommateurs se tourne vers des alternatives moins onéreuses, comme les produits en conserve ou surgelés, tandis que d’autres réduisent simplement leurs achats. Cette évolution soulève des inquiétudes quant aux carences potentielles en micronutriments essentiels, notamment en vitamine C, en potassium et en fibres, des éléments clés pour la prévention des maladies cardiovasculaires et du diabète.

Une alimentation moins diversifiée et plus déséquilibrée à cause de l'inflation

Au-delà des arbitrages liés au prix, la structure des repas est elle aussi en pleine mutation. La nécessité de limiter les dépenses pousse certains ménages à diminuer la taille des portions, voire à sauter des repas, ce qui entraîne des conséquences directes sur la régulation du métabolisme et la satiété. Un tiers des Français déclare avoir déjà sauté des repas pour des raisons financières, une pratique qui peut déséquilibrer le fonctionnement de l’organisme, favoriser les fringales et perturber l’assimilation des nutriments.

La tendance à privilégier des aliments moins coûteux, souvent plus denses en énergie mais pauvres en nutriments essentiels, se traduit également par une hausse de la consommation de produits industriels. Ces derniers, bien que pratiques et accessibles, sont associés à une augmentation du risque de surpoids, de troubles métaboliques et de maladies chroniques lorsqu’ils deviennent une part trop importante de l’alimentation. L’ultra-transformation des aliments et la présence accrue d’additifs alimentaires posent un enjeu de santé publique à long terme.

L'impact de la précarité alimentaire sur la santé mentale

Les effets de l’inflation sur l’alimentation ne se limitent pas à la dimension physiologique. La pression économique qui pèse sur les foyers fragilise également la relation des individus avec leur alimentation. L’augmentation des prix contraint une partie de la population à revoir son rapport à la nourriture, générant parfois du stress, des frustrations et une forme de culpabilité liée à l’impossibilité de maintenir une alimentation perçue comme saine.

La précarité alimentaire affecte en particulier les jeunes adultes et les ménages à faibles revenus. Près de la moitié des 18-24 ans et une grande partie des familles aux ressources modestes déclarent avoir modifié en profondeur leurs choix alimentaires en raison de contraintes budgétaires. Le fait de devoir renoncer à certains produits jugés essentiels ou de dépendre davantage de l’aide alimentaire accentue un sentiment d’injustice et de dévalorisation sociale, avec des répercussions possibles sur la santé mentale.

Vers une nouvelle gestion du budget alimentaire ?

Face à ces bouleversements, les consommateurs mettent en place des stratégies pour limiter l’impact de l’inflation sur leur alimentation. Le recours aux promotions et aux applications anti-gaspillage devient une pratique courante, permettant d’accéder à des produits alimentaires à moindre coût. Les enseignes de discount enregistrent également une progression de leur fréquentation, de même que l’intérêt croissant pour les marques de distributeur, qui offrent des alternatives plus économiques aux grandes marques.

La gestion du budget alimentaire passe aussi par une évolution des habitudes de cuisine. La hausse des prix de l’énergie a conduit une majorité des foyers à adapter leurs méthodes de cuisson, en réduisant les temps de chauffe, en utilisant davantage le micro-ondes ou en privilégiant des préparations nécessitant moins d’énergie.

Un enjeu de santé publique majeur

Alors que les pouvoirs publics mettent en place des dispositifs de soutien pour limiter l’impact de l’inflation sur les ménages les plus précaires, la question de l’accessibilité à une alimentation équilibrée reste essentielle. La sensibilisation à la nutrition et l’accompagnement des consommateurs vers des choix alimentaires adaptés doivent être renforcés pour éviter une dégradation à long terme de l’état de santé de la population.

Dans ce contexte, les professionnels de santé ont un rôle important à jouer pour encourager des pratiques alimentaires adaptées aux contraintes économiques, tout en garantissant des apports nutritionnels suffisants. L’inflation n’est pas seulement un défi économique, elle représente un enjeu fondamental pour la santé publique et nécessite une réponse coordonnée entre acteurs de la nutrition, institutions et consommateurs.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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